A
entendre les négationnistes , l'antisémitisme assumé serait une
cause de mort sociale immédiate.
Pourtant,
l'apologue de Faurisson, celui que le plus célèbre des
négationnistes français présente comme son héritier idéologique,
Paul Eric Blanrue, ne semble pas souffrir d'une quelconque
persécution. Bien au contraire, un journal comme Le Point lui ouvre
ses colonnes pour y parler ...d'histoire.
En
fait, il s'agit d'une publicité faite au magazine Historia puisque
l'article en question publié le 20 décembre 2012 par Le Point est
issu d'un dossier spécial de la revue intitulé « Fins du
monde » .
Cela
n'a pas été la seule activité de Paul Eric Blanrue en décembre
2012, naturellement : il suffit d'ouvrir son blog pour y trouver
un appel à soutien financier des négationnistes allemands
emprisonnés ou des nouvelles de Vincent Reynouard, néo-nazi
négationniste Mais aussi une critique élogieuse du dernier opus de
Maria Poumier, figure de l'extrême-droite antisémite, mais
également des tombereaux d'ignominies contre Elie Wiesel ou Serge
Klarsfeld, avec des liens directs vers des sites négationnistes
américains.
Est-ce
cette activité débordante que Le Point considère comme un gage de
sérieux et de compétence en matière historique justifiant
l'accueil de Blanrue dans le journal ? Ou la rédaction
a-t-elle « juste » considéré que la négation de
l'extermination des Juifs par les nazis était un « détail »
n'engageant en rien le « reste » du « travail »
de Blanrue ?
A
première vue, il est vrai que l'article publié dans Le Point n'a
rien à voir avec la Seconde Guerre Mondiale. Il évoque une
prophétie attribuée à saint Malachie sur les futurs papes,
prophétie qui en fait a manifestement été écrite 400 ans plus
tard par un moine. Ce qui explique pourquoi les éléments de la
prophétie antérieurs à la date de son écriture réelle sont
justes alors que ceux qui sont postérieurs sont faux.
Le
sujet de l'article en lui-même n'a donc rien que de très banal :
en effet, il y a fort longtemps que l'explication de la soit disant
prophétie de Saint Malachie a été donnée, et pas par Paul Eric
Blanrue. N'importe quel étudiant en histoire des religions aurait pu
écrire un article sur le sujet, et Le Point n'avait donc pas besoin
d'aller chercher un compagnon de route de Robert Faurisson pour le
faire.
Mais
enfin, comme disait avec des accents émouvants un personnage du film
« OSS 117 : Le Caire Nid d'Espions, » , «
les nazis n'ont-ils donc pas le droit à une deuxième chance » ?
En
fait, contrairement aux apparences, l'article de Blanrue publié dans
Le Point a bien tout à voir avec la promotion du négationnisme.
Celle-ci est faite par un procédé extrêmement grossier qui ne peut
abuser que des gens ayant déjà un niveau de complaisance élevé
pour les négationnistes et les militants d'extrême-droite, au point
de ne même pas procéder à une vérification des sources de
l'article, même quand il n'y a que deux ouvrages cités.
Or
le second de ces ouvrages, "Autour de la Tiare" est un opus publié dans une maison
d'édition fondée en 1928 par un militant de l'Action Française
Fernand Sorlot, qui a le triste privilège d'avoir la première
publié la traduction française de Mein Kampf. Par la suite, Fernand
Sorlot fut condamné en 1948 à vingt ans d'indignité nationale et à
la confiscation de ses biens pour ses activités durant l'Occupation.
Ce qui n'empêcha pas la maison d'édition de continuer ses activités
en assurant la distribution des œuvres de Maurice Bardèche, le
premier négationniste français. Dans les nouveautés publiées par
les Nouvelles Editions Latines, on trouve par exemple un ouvrage du
Père Michel Lelong, compagnon de route de Garaudy, chroniqueur dans
le journal Flash d'Alain Soral, témoin en faveur de Papon à son
procès.
Quant
à l'ouvrage précis des Nouvelles Editions Latines cité par
Blanrue, « Autour de La Tiare » , écrit dans les années 20 il est
l'oeuvre d'un certain Roger Duguet : il s'agit d'un pseudonyme
utilisé par l'abbé Paul Boulin catholique antisémite qui écrivit
dans « La revue internationale des sociétés Secrètes « ,
organe destiné à lutter contre la « judéo-maçonnerie »
, avant de lancer son propre journal « Les Cahiers anti judéo-maçonniques ».
Voilà
les références conseillées aux amateurs d'histoire par le journal
Le Point , grâce à son collaborateur Paul Eric Blanrue.
L'on
peut sans trop extrapoler imaginer qu'au réveillon 2012 de Paul Eric
Blanrue, celui-ci n'aura pas manqué de faire rire ses invités avec
ce « glissage de quenelle » , comme on dit chez les
nazis.
Mais
Le Point pourra difficilement arguer de « tromperie sur la
marchandise » , si d'aventure la direction du journal se
trouvait finalement gênée d'avoir fait la promotion d'une maison
d'édition pro-nazie et d'avoir remis en avant un auteur antisémite
des années 20 oublié dans les poubelles de l'histoire. On ne peut
pas se plaindre de se voir servi à table ce qu'on a commandé en
menu.
Et
lorsqu'on invite un négationniste dans son journal, il est normal
que le résultat soit de la propagande néo-nazie.
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