mercredi 29 mai 2013

Quand la gauche se voile la face, l'extrême-droite s'exhibe ...

Pour les partisan(e)s de gauche de l'interdiction du port du voile dans des lieux et des circonstances de plus en plus nombreux au fur et à mesure des années et des propositions de loi, ce combat n'aurait rien à voir avec du racisme et/ou de l'islamophobie. Bien au contraire, ce serait une démarche qui permettrait de couper l'herbe sous le pied à l'extrême-droite, en ne lui laissant pas « le monopole de la laïcité » et cela permettrait justement de mener sereinement et en parallèle le combat antiraciste.

Pourtant, lorsque des personnalités se revendiquant de la laïcité ont choisi de lancer une initiative pour l'interdiction du voile dans les établissements privés suite à l'affaire Babyloup, l'antiracisme a bien été considéré comme une valeur négligeable et de manière très concrète : lorsqu'il s'est agi de choisir cinquante « premier(e)s signataires, destinées à mettre en valeur la « diversité citoyenne » de l'appel , cela n'a dérangé personne de solliciter Michèle Vianès.

Pourtant cette même Michèle Vianès a assigné la LICRA en justice, il y a déjà quelques temps, et la première audience s'est déroulée mardi 14 mai dernier. Le motif ? Dans un dossier sur l'extrême-droite lyonnaise publié en 2012, la LICRA accusait Mme Viannès, présidente de l'association Regards de Femmes, d'être « xénophobe » et de cacher « derrière un discours anti-musulmans un renouveau du racisme anti-arabe”.  

De deux choses l'une : ou cette accusation n'a aucun fondement, et les initiateurs et signataires de la pétition de Marianne pourront dénoncer à juste titre des amalgames inacceptables entre leur combat laïque et le racisme. Ou cette accusation est vraie, et dans ce cas, en toute connaissance de cause, les « anti-voile » légitiment les attaques contre l'antiracisme venues de l'extrême-droite.

En réalité, en ce qui concerne Michèle Vianès, le débat est assez vite clos.

D'abord parce que madame Vianès est élue municipale de Debout la République à Caluire, petite ville surnommée le « Neuilly Lyonnais », et a également été candidate de ce mouvement aux élections européennesde 2009. Evidemment, on peut débattre du fait de savoir si Nicolas Dupont-Aignant est plutôt « droite extrême » ou « extrême-droite ». Mais disons que la controverse serait un peu oiseuse et même déplacée, surtout lorsqu'il est question de racisme et d'islamophobie : l'invité vedette de Debout la République à la convention nationale qui s'est tenue ce samedi 25 mai était en effet le numéro 2 de l'UKIP . Ce parti d'extrême-droite anglais vient de faire 25% aux municipales et ses membres appellent aux attaques physiques contre les musulmans en ce moment même, entre deux sorties négationnistes.

Michèle Vianès est aussi une activiste très motivée de la société civile : dès la création de Riposte Laïque, elle s'investit à fond dans l'association, et l'on ne compte plus ses articles sur le site des organisateurs du célèbre Apéro Saucisson Pinard. Mme Vianès ne s'est pas cachée non plus de sa participation côte à côte avec le Bloc Identitaire et des membres de l'extrême-droite suisse aux Assises contre l'Islamisation en 2010. On trouve encore sur le site de son association la revendication assumée de cette collaboration avec l'extrême-droite dure, lors de son intervention à un colloque lyonnais le 30 septembre 2011.

Ce sont ces faits qui étaient exposés dans le dossier contre l'extrême-droite lyonnaise de la LICRA, et c'est cet exposé de son activité militante que Mme Vianès ne veut pas voir qualifié de raciste. Si elle gagne son procès, la jurisprudence nous concernera tous, puisque le compagnonnage avec des organisations d'extrême-droite ne pourra plus être dénoncé pour ce qu'il est.

Malheureusement cela ne semble pas inquiéter les autres initiateurs et initiatrices de la pétition Babyloup, qui, pourtant se revendiquent pour beaucoup de l'antiracisme militant, et dont certain(e)s sont même les cibles de Riposte Laïque ou du Bloc Identitaire.

A vrai dire, les seuls à s'être inquiétés publiquement de cette cohabitation entre des amis de l'extrême-droite et des gens de gauche sur cette pétition...ce sont justement les militants d'extrême-droite. Le 28 mars 2013, une rédactrice du site Riposte Laïque publie un appel à signer la pétition de Marianne et « tranquillise » ses camarades : bien sûr la pétition est signée notamment par des « laïques de gauche », qu'il est normal de haïr, mais «  toute loi contre le voile est bonne à prendre » et surtout «Michèle Vianes, présidente de « Regard de Femmes » est en matière de voile du même côté que nous. C’est elle le soutien de la première heure de Natalia Baléato. Et témoignage de son engagement, elle bataille contre la LIcra à laquelle elle a intenté un proçès pour avoir traité son association de mouvement « racistes », « xénophobe », « révisionniste », « cachant derrière un discours antimusulmans un renouveau du racisme anti-arabe ». ».  

Voilà les fascistes rassurés. Les antiracistes le sont moins, évidemment.

La question,en effet, est bien celle de la constitution d'un mouvement « transcourants », « ni droite, ni gauche » autour de certaines thématiques . Ce dont il s'agit c'est bien de la banalisation de l'extrême-droite , de son intégration au sein de la gauche...et en conséquence de l'exclusion de celles et ceux qui refusent cette intégration. Le silence autour du procès intenté par Vianès contre la LICRA n'est pas autre chose que cela.

Il ne s'agit pas d'une « infiltration » bien menée, et en toute discrétion. Comme nous l'avons vu, Michèle Vianès assume son engagement électoral dans un parti d'ultra-droite comme elle assume sa participation à des évènements d'extrême-droite, sur le sujet même à propos duquel une partie de la gauche travaille avec elle : l'islam, donc.

Cette collaboration, malheureusement, ne date pas d'aujourd'hui : en août 2009, une autre pétition, contre le port de la burka et du voile dans l'espacepublic est lancée par trois animateurs/animatrices de Riposte Laïque, Pierre Cassen, Anne Zelensky, et Annie Sugier (1), cette dernière figurant également dans les premiers signataires de la pétition Baby Loup. Cette pétition se veut un appui à la mise en place, un mois plus tôt d'une mission parlementaire d’information sur « la pratique du voile intégral sur le territoire national » initiée par le député communiste André Gérin. Cette pétition sera signée par des secrétaires fédéraux du Parti socialiste, par des syndicalistes CGT et CFDT, par des militantes féministes. Déjà ces signataires ne sont pas dérangés d'être en compagnie d'Ivan Rioufol et d'autres personnalités d'ultra-droite sur un appel lancé par une association, qui à l'époque déjà ne cache pas ses proximités à l'extrême-droite.

A l'heure où la perplexité s'exprime dans les rangs de la gauche à chaque fois que des militant(e)s en vue passent avec armes et bagages au FN où dans d'autres formations d'extrême-droite, où il est de mise de dire à chaque fois qu' « on n'avait rien vu venir », il est peut-être urgent de s'interroger : lorsqu'on construit soi-même les passerelles, est-il étonnant que des gens les empruntent ?

Lorsqu'on considère que certains sujets justifient une alliance avec l'extrême et l'ultra-droite, est-il étonnant qu'ensuite des militant(e)s estiment que c'est l'extrême-droite qui sera la plus à même de combattre sur ces sujets ?

A regarder les discours portés sur les femmes voilé(e)s et le sort à leur réserver, à gauche et à l'extrême-droite, on fait très vite un constat sans appel : la position de l'extrême-droite n'a jamais varié, leur objectif étant l'interdiction du voile partout , comme support de l'exclusion des musulmanes de tous les secteurs de la société. Riposte Laïque se crée ainsi en 2007 sur l'affaire « Truchelut » du nom d'une tenancière de chambres d'hôtes qui avait refusé ses prestations à une femme sous prétexte qu'elle était voilée. Mme Vianès saisit, elle, et depuis longtemps, toutes les occasions pour exclure les musulmanes de la vie publique. Ainsi en 2002, son association déclenche sciemment une polémique concernant la participation d'une femme voilée dans une commission extra-municipale du Grand Lyon. A cette occasion, elle accuse les femmes voilées dans leur ensemble d'être « complice de la domination masculine, et donc des viols collectifs avec actes de barbarie » et ajoute au passage une comparaison  ignoble entre le voile et l'étoile jaune , n'hésitant pas à relativiser l'antisémitisme d'Etat.

Dans la partie de la gauche qui exige sans cesse de nouvelles mesures contre la présence des femmes voilées, le discours ne cesse d'évoluer et de se contredire, au fil des années : au départ, il s'agissait « seulement » de l'école publique , de ses professeurs et de ses élèves. Puis, l'on est passé aux parents d'élèves et à l'extérieur de l'école, puisque ce sont les mères accompagnatrices de sorties scolaires qui ont été visées. Ensuite, la notion de laïcité , pourtant très clairement liée à l'Etat, leur a semblé pouvoir être étendue aux assistantes maternelles , puis aux crèches privées. Et demain ?

Et le glissement ne concerne pas seulement les lieux et les espaces sociaux où le voile devrait être interdit. On est lentement passés d'un discours fondé théoriquement sur la protection des femmes et des jeunes filles, et sur le « potentiel libérateur » de l'interdiction du voile, à une logique qui désigne clairement les femmes voilées comme des dangers pour les autres, et notamment pour les enfants qu'il s'agirait de « protéger ».

De victimes passives de l'intégrisme religieux, toutes les femmes voilées sont devenues dans les discours de gauche, des propagatrices actives de cet intégrisme. Ce ne sont donc pas des militantEs d'ultra-droite comme Michèle Vianès qui ont infiltré la gauche , mais bien une partie de la gauche qui en vient à valider la vision paranoïaque et discriminante des femmes voilées portée par l'extrême-droite depuis très longtemps.

La femme voilée devient ainsi l'ennemi fantasmé qui permet manifestement l'occultation du danger réel , celui de l'extrême-droite, dans l'esprit de militantEs de gauche qui finissent par faire alliance avec des ennemis objectifs de la laïcité : par exemple des compagnonnes de route du Bloc Identitaire, comme Mme Vianès, ce Bloc Identitaire qui aujourd'hui constitue la fraction la plus dure et la plus violente du mouvement opposé au mariage pour tous . Ce mouvement qui entend dicter sa loi, fondée sur la religion, à une cérémonie civile.

Et ce mouvement a bien montré d'où venait la menace réelle contre la laïcité : sans surprise de l'extrême-droite française et de l'Eglise Catholique qui a mobilisé massivement une partie des croyants. A l'inverse, si certains responsables musulmans se sont alliés aux responsables de la Manif pour Tous, notamment ceux de l'UOIF, mais aussi ceux de l'association Fils de France, parrainés par Tarek Oubrou et Robert Ménard, il faut bien constater que leur initiative n'a pas amené un nombre significatif de musulmans à se mobiliser, et ce quelle que soit leur opinion sur le sujet. Celle-ci est restée très majoritairement cantonnée à la sphère privée et à certains lieux de culte.

Il y a donc bien urgence sur le front de la défense de la laïcité : et il y aurait eu ces derniers mois mille sujets de pétition auxquelles des personnalités connues auraient pu apporter leur concours. Au premier chef, la défense de l'école et du secteur public de la petite enfance, qui sont bien menacés, à forces de coupes drastiques dans les budgets, de manque de personnel , et, ce pendant que le secteur privé ne cesse de se développer avec des financements publics. Le voilà, le vrai danger, le risque fondamentaliste éventuel : la destruction de l'école publique, qui amènera à un retour en arrière effectif, la prise d'influence grandissante du secteur de l'enseignement privé à dominante religieuse.

Malheureusement, celles et ceux qui aujourd'hui pensent sincèrement défendre la laïcité en se laissant hypnotiser par le chiffon rouge du voile agité par l'extrême et l'ultra-droite , au point de s'allier avec certainEs de ses représentantes, vont contribuer à l'enterrer. A la grande joie de tous les fondamentalistes religieux, qui avec des ennemis pareils, peuvent même se passer d'amis. 

(1) Depuis Annie Sugier a quitté Riposte Laïque,  non sans avoir en juin 2010 , sur son dernier article visible sur le site, applaudi l'initiative de l'Apéro Saucission Pinard menée avec le Bloc Identitaire.

Sur l'offensive de l'extrême-droite et du patronat, sous couvert de prétendue défense de la laïcité, voir aussi cet article sur la situation à la RATP  

samedi 25 mai 2013

Paul-Eric Blanrue et "Le Point"... de détail.

A entendre les négationnistes , l'antisémitisme assumé serait une cause de mort sociale immédiate.

Pourtant, l'apologue de Faurisson, celui que le plus célèbre des négationnistes français présente comme son héritier idéologique, Paul Eric Blanrue, ne semble pas souffrir d'une quelconque persécution. Bien au contraire, un journal comme Le Point lui ouvre ses colonnes pour y parler ...d'histoire.

En fait, il s'agit d'une publicité faite au magazine Historia puisque l'article en question publié le 20 décembre 2012 par Le Point est issu d'un dossier spécial de la revue intitulé «  Fins du monde » .

Cela n'a pas été la seule activité de Paul Eric Blanrue en décembre 2012, naturellement : il suffit d'ouvrir son blog pour y trouver un appel à soutien financier des négationnistes allemands emprisonnés ou des nouvelles de Vincent Reynouard, néo-nazi négationniste Mais aussi une critique élogieuse du dernier opus de Maria Poumier, figure de l'extrême-droite antisémite, mais également des tombereaux d'ignominies contre Elie Wiesel ou Serge Klarsfeld, avec des liens directs vers des sites négationnistes américains.

Est-ce cette activité débordante que Le Point considère comme un gage de sérieux et de compétence en matière historique justifiant l'accueil de Blanrue dans le journal ? Ou la rédaction a-t-elle «  juste » considéré que la négation de l'extermination des Juifs par les nazis était un « détail » n'engageant en rien le « reste » du « travail » de Blanrue ?

A première vue, il est vrai que l'article publié dans Le Point n'a rien à voir avec la Seconde Guerre Mondiale. Il évoque une prophétie attribuée à saint Malachie sur les futurs papes, prophétie qui en fait a manifestement été écrite 400 ans plus tard par un moine. Ce qui explique pourquoi les éléments de la prophétie antérieurs à la date de son écriture réelle sont justes alors que ceux qui sont postérieurs sont faux.

Le sujet de l'article en lui-même n'a donc rien que de très banal : en effet, il y a fort longtemps que l'explication de la soit disant prophétie de Saint Malachie a été donnée, et pas par Paul Eric Blanrue. N'importe quel étudiant en histoire des religions aurait pu écrire un article sur le sujet, et Le Point n'avait donc pas besoin d'aller chercher un compagnon de route de Robert Faurisson pour le faire.

Mais enfin, comme disait avec des accents émouvants un personnage du film «  OSS 117 : Le Caire Nid d'Espions, » , «  les nazis n'ont-ils donc pas le droit à une deuxième chance » ?

En fait, contrairement aux apparences, l'article de Blanrue publié dans Le Point a bien tout à voir avec la promotion du négationnisme. Celle-ci est faite par un procédé extrêmement grossier qui ne peut abuser que des gens ayant déjà un niveau de complaisance élevé pour les négationnistes et les militants d'extrême-droite, au point de ne même pas procéder à une vérification des sources de l'article, même quand il n'y a que deux ouvrages cités.

Or le second de ces ouvrages, "Autour de la Tiare" est un opus publié dans une maison d'édition fondée en 1928 par un militant de l'Action Française Fernand Sorlot, qui a le triste privilège d'avoir la première publié la traduction française de Mein Kampf. Par la suite, Fernand Sorlot fut condamné en 1948 à vingt ans d'indignité nationale et à la confiscation de ses biens pour ses activités durant l'Occupation. Ce qui n'empêcha pas la maison d'édition de continuer ses activités en assurant la distribution des œuvres de Maurice Bardèche, le premier négationniste français. Dans les nouveautés publiées par les Nouvelles Editions Latines, on trouve par exemple un ouvrage du Père Michel Lelong, compagnon de route de Garaudy, chroniqueur dans le journal Flash d'Alain Soral, témoin en faveur de Papon à son procès.

Quant à l'ouvrage précis des Nouvelles Editions Latines cité par Blanrue, « Autour de La Tiare »  , écrit dans les années 20  il est l'oeuvre d'un certain Roger Duguet : il s'agit d'un pseudonyme utilisé par l'abbé Paul Boulin catholique antisémite qui écrivit dans « La revue internationale des sociétés Secrètes « , organe destiné à lutter contre la « judéo-maçonnerie » , avant de lancer son propre journal «  Les Cahiers anti judéo-maçonniques ».

Voilà les références conseillées aux amateurs d'histoire par le journal Le Point , grâce à son collaborateur Paul Eric Blanrue.

L'on peut sans trop extrapoler imaginer qu'au réveillon 2012 de Paul Eric Blanrue, celui-ci n'aura pas manqué de faire rire ses invités avec ce « glissage de quenelle » , comme on dit chez les nazis.

Mais Le Point pourra difficilement arguer de « tromperie sur la marchandise » , si d'aventure la direction du journal se trouvait finalement gênée d'avoir fait la promotion d'une maison d'édition pro-nazie et d'avoir remis en avant un auteur antisémite des années 20 oublié dans les poubelles de l'histoire. On ne peut pas se plaindre de se voir servi à table ce qu'on a commandé en menu.

Et lorsqu'on invite un négationniste dans son journal, il est normal que le résultat soit de la propagande néo-nazie.


mercredi 15 mai 2013

Après les manifestations du 12 mai : poursuivre la mobilisation.


Cet article est publié en commun avec nos camarades du blog Memorial 98, que nous vous invitons à consulter et avec qui nous avions lancé l'appel pour le 12 mai

OPERATION POULPE

Après les manifestations du 12 mai : poursuivre la mobilisation.

Ne pas laisser passer: tel était pour nous le sens de l'exigence lancée à la Préfecture de Police et à la Mairie de Paris pour qu'elles prennent les mesures nécessaires afin que néo-nazis, nostalgiques de Vichy et fascistes du 3e millénaire ne défilent pas une nouvelle fois dans le centre de Paris le 12 mai.

Nous ne sommes pas naïfs: en une année de gouvernement de gauche, seules deux manifestations de l'extrême-droite ont été interdites et ce en début de mandat : une à Lyon et une à Paris, toutes deux organisées par la branche jeunesse de l'Oeuvre Française, les Jeunesses Nationalistes

Depuis, c'est le laisser faire quasi-total, alors même que se multiplient les actes de violences contre les membres des « minorités », ainsi que les attaques signées d'une croix gammée, d'une croix celtique, du sigle du GUD ou des Jeunesses Nationalistes contre les lieux de culte, les locaux associatifs ou politiques. Ainsi  lors des manifestations homophobes contre le mariage pour tous, les divers groupes fascistes et intégristes s'en sont donnés à cœur joie dans le style du fantasme de « Février 1934 ».

Cette semaine de mobilisation annuelle des groupes fascistes s’est inscrite dans ce contexte. Outre les manifestations parisiennes du 12 mai autorisées par la préfecture de Police, des actions ont été organisées le jeudi 9 mai, à Lyon, à Rennes et dans d'autres régions par les Jeunesses Nationalistes.

Les forces de police ont bien mis en oeuvre des mesures répressives : pas contre   les fascistes, mais contre celles et ceux qui ont, fort légitimement, tenté de s'opposer aux parades néo-nazies.

Ainsi à Lyon, une contre-manifestation antifasciste le 9 mai a donné lieu à l'arrestation immédiate de 25 militantEs, dont six ont vu leur garde-à-vue prolongée après les premières 24H, tandis que leurs soutiens venus manifester au commissariat voyaient leur identité contrôlée. Pendant ce temps, les Jeunesses Nationalistes manifestaient, sous protection policière.

À Rennes le même jour, c'est la mobilisation des antifascistes et pas celle des pouvoirs publics qui a empêché la tenue du rassemblement des Jeunesses Nationalistes,
À Paris, la Préfecture de Police qui trouve parfaitement normal et conforme à l'ordre public de laisser défiler des milices néo-pétainistes et des jeunes gens vêtus de noir faisant le salut fasciste a infligé une garde-à-vue de 9 heures aux Femen venues déployer une banderole anti-nazie, sous le prétexte de s’être livrées à une « exhibition sexuelle ». On notera au passage le parallélisme de cette qualification policière et les nombreuses insultes sexistes et vulgaires proférées à l’encontre des Femen par les manifestants d'extrême-droite.

L’attitude des autorités face à notre appel apporte un triste démenti à celles et ceux qui objecteraient l'existence d' « autres méthodes  plus respectueuses des règles » pour empêcher l'exhibition publique de la haine raciste, antisémite, sexiste, homophobe. En effet, notre appel a connu une diffusion  importante, à la fois sur les réseaux sociaux, sur les sites de collectifs et d'organisations antiracistes. Le journal l'Humanité a relayé notre appel dans son intégralité. Nous remercions notamment la LDH Toulon, Ras l'Front Rouen, le collectif antifasciste de Bordeaux et tant d’autres qui ont diffusé et publié cet appel . De très nombreux mails ont été envoyés, à la Préfecture de Police, au Ministère de l'Intérieur, au Maire de Paris.

Les différentes autorités ont autorisé les différents défilés et ont de surcroît préféré opposer un silence quasi-total à nos demandes. L'exception concerne le cabinet du Maire de Paris, qui a prétendu avec une certaine hypocrisie n'être aucunement concerné par nos messages, en nous renvoyant vers la Préfecture de Police. Pourtant, en 2008, le Maire de Paris avait lui-même demandé au Préfet l'interdiction de ces mêmes manifestations et l’avait obtenue. Il est vrai qu'à l'époque, il s'agissait d’un gouvernement de droite ; la dénonciation de sa complaisance face à l'extrême-droite offrait des avantages politiques plus immédiats à la veille d'élections municipales.

C'est grâce à la mobilisation de tous ceux qui refusent le silence et la passivité face à l'offensive fasciste que l’atmosphère peut se modifier et entraîner aussi les grandes organisations antiracistes: ainsi SOS Racisme nous a fait savoir qu’elle avait de son côté demandé l'interdiction mais sans juger utile, à notre connaissance,  de communiquer publiquement sur le sujet.

«  Ils n'étaient que quelques centaines, et même moins que l'année dernière » lit-on ici et là en guise de commentaire face aux parades du 12 mai. Mais l'examen attentif de la situation dans l'Hexagone montre, certes que les néo-nazis et fascistes assumés ne sont souvent que « quelques centaines », voire « quelques dizaines » lors de leurs actions. Mais ces actions se démultiplient sur le territoire, et se déroulent chaque semaine.

D'autres encore affirment qu'il s'agit là d'une mouvance, certes dangereuse, mais isolée. La réalité est cependant autre : les Jeunesses Nationalistes sont parfaitement intégrées aux manifestations homophobes, il arrive même, comme à Lyon le 5 mai dernier , qu’en alliance avec le GUD, elles prennent la tête d'une de ces manifestations et en chassent Frigide Barjot.

Partout en Europe, l'ascension de l'extrême-droite « légale », va de pair avec celle des courants qui prônent ouvertement la violence et assument publiquement l'héritage des fascismes du XXe siècle. Partout en Europe, la dédiabolisation de l'extrême-droite légale va de pair avec la tolérance sur les agissements de l'extrême-droite radicale et violente, présentée par les pouvoirs publics, de droite ou hélas de gauche comme un « épiphénomène ».

En France comme ailleurs, d'ailleurs ces deux extrême-droite sont liées organiquement et au quotidien : ainsi ce mercredi 15 mai, l'invité de « 3ème Voie » au local parisien de Serge Ayoub est Robert Ménard, journaliste reçu sur de nombreuses chaînes de télé et de nombreux médias radiophoniques et qui a déjà annoncé sa probable candidature aux municipales à Béziers dans le cadre du Rassemblement Bleu Marine, censé constituer l'aile « modérée » du FN.

Nous continuerons à ne rien laisser passer, à dénoncer inlassablement l’extrême-droite et ses idées de xénophobie et de haine, à montrer au gouvernement de gauche que celles et ceux qui l'ont porté au pouvoir n'acceptent pas les parades fascistes comme un mal nécessaire.

MEMORIAL 98
OPERATION POULPE

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lundi 6 mai 2013

Peste brune : non à la parade de l'extrême-droite le 12 mai

Pour relayer efficacement cet appel lancé par Opération Poulpe et l'association Memorial 98, infos en fin de texte


Peste brune : non à la parade de l'extrême-droite le 12 mai

Ce 12 mai, une nouvelle fois, l'extrême-droite la plus violente annonce plusieurs manifestations dans Paris.

Plusieurs groupes et organisations, dont certains sont ouvertement néo-nazis, vont en effet « commémorer » à leur manière, la mort d'un de leurs militants, survenue le 9 mai 1994 suite à une manifestation non autorisée et violente, organisée par le GUD ; pour certains d'entre eux il s’agit aussi de rendre leur « hommage » à Jeanne d'Arc.

Le premier cortège partira de la Madeleine à 10h ; il est organisé par le groupe « 3ème Voie » son dirigeant Serge Ayoub alias " Batskin" , a animé nombre d’organisations et de mouvances, dont certains militants ont très rapidement franchi le pas vers la violence active, voire le meurtre. Ainsi le 18 juin 1990 au Havre, le jeune James Dindoyal était empoisonné puis jeté à l'eau, avant de décéder dans d'atroces souffrances. Les responsables étaient deux membres des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires, proches de Serge Ayoub (1).

Aujourd'hui, Serge Ayoub et ses troupes prétendent à la respectabilité : cependant, très récemment, le 23 avril dernier les deux militants armés venus soutenir les agresseurs homophobes du bar de Lille et interpellés par la police, ont fait référence à leur appartenance au groupe 3ème Voie (2).

Cette manifestation est appelée au nom de la lutte contre l’’ impérialisme ». Or, la dernière initiative de ce type (3) a rassemblé autour de 3ème Voie des organisations de défense de la dictature syrienne, organisations dont les militants ont attaqué très violemment, à Paris et ailleurs en France, des manifestations organisée par les démocrates syriens (4).

Cette initiative est d’ailleurs rejointe par d'autres groupes notamment une partie des « nationalistes autonomes », belges et français, dont la dangerosité immédiate n'est plus à prouver. Ainsi, leur section de Nancy s‘est spécialisée dans l‘agression des cibles habituelles de l'extrême-droite, membres des minorités ou des mouvements progressistes (5).

La seconde manifestation est appelée notamment par l'Oeuvre Française, à 10h à la Concorde. On y trouvera aussi les Jeunesses Nationalistes et le GUD. Ces trois organisations sont ouvertement pétainistes et pro-nazies. Leur propagande est faite d'un mélange extrêmement violent d'antisémitisme, de racisme, d'homophobie et de négationnisme. Les Jeunesses Nationalistes comme le GUD sont à l'origine de nombreuses agressions ces deux dernières années : très récemment, le GUD a appelé ouvertement à la violence contre les homosexuels (6), et l'un de ses membres a également été condamné pour l'agression grave d'un jeune musulman dans les Yvelines (7).

Plus globalement c'est autour de ces groupes et de leur propagande en ligne, que gravitent et se forment les individus qui attaquent les locaux des associations LGBT, des forces de gauche, les centres de planning familial, les mosquées. C'est aussi sur leurs sites et leurs pages Facebook que sont diffusées des théories meurtrières contre les Juifs et les Roms et des appels au passage à l’acte contre ces populations.

L'après-midi, une troisième manifestation se tiendra à l'appel de CIVITAS, et nul doute que nombre des manifestants du matin iront ensuite grossir les rangs de l'organisation catholique intégriste.

Ces dernières semaines, galvanisée par l'élan violent des manifestations homophobes, cette extrême-droite n'hésite plus, même dans la capitale, à passer à l'attaque physique contre les manifestations ou les militants : le 1er mai, un cortège en hommage à Brahim Bouarram a été attaqué par une quarantaine de néo-fascistes armés (8).

ll ne s’agit pas de « groupuscules » sans importance ou anecdotiques: ces groupes sont parfaitement intégrés et tolérés, aussi bien dans les manifestations homophobes soutenues par l'UMP que dans les défilés du FN " dédiabolisé" quoi qu'en disent Marine Le Pen ou Frigide Barjot. C'est bien au sein du défilé du FN du 1er mai, au vu et au su de son service de sécurité, qu'ont par exemple été diffusées et collées des affiches comportant l'adresse personnelle de journalistes et d'intellectuels désignés comme les cibles à abattre (9)


Comment comprendre que de tels défilés belliqueux, organisés par des individus et des organisations ayant fait la preuve de leur violence, se voient autorisés ?
Stopper cette agitation haineuse et dangereuse doit constituer une priorité pour un gouvernement se revendiquant du progressisme et affirmant vouloir protéger les minorités mises en cause.

Il n'y a aucun obstacle juridique pour interdire ces manifestations du 12 mai : les précédents violents lors des manifestations d’extrême-droite sont légion, même en prenant uniquement en compte les derniers mois. Le «  trouble à l'ordre public » est donc bien constitué sauf si l’on considère que l'attaque de certaines catégories de la population ne provoque pas un trouble conséquent et important.

La démocratie, c'est la protection du droit de chacun à vivre en paix ; elle ne consiste à pas autoriser les appels à la violence contre une partie de la population, même sous couvert de liberté d'expression.


Ça suffit. Nous refusons de vivre dans la peur des violences qui entourent ces défilés de la haine.


Nous exigeons du Ministre de l'Intérieur, et du Préfet de Police qu'ils mettent un terme à cette agitation haineuse permanente et qu'ils prennent les mesures nécessaires pour rendre l'espace public à tous et à toutes.

Nous demandons également à toutes les organisations progressistes et antiracistes et notamment aux plus importantes d’entre elles de prendre la mesure de la gravité de la situation et de se mobiliser pour que ce 12 mai ne soit pas une nouvelle banalisation des parades fascistes.







Comment relayer cet appel ?
Vous pouvez également l'envoyer aux associations de lutte contre le racisme et l'antisémitisme, de défense des droits de l’homme, afin qu'ils prennent des initiatives contre ces parades d'extrême-droite. Et bien sûr, le diffuser dans vos propres réseaux... ou faire votre propre appel.



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